Doris fait « pousser » les passions des enfants

L’histoire de Doris

Qu’est-ce qu’il se passait dans votre vie et dans votre entourage avant que vous ne changiez votre mode de vie?

Je suis conductrice d’autobus pour le District scolaire Nord-Est et j’aime beaucoup les enfants. Au cours de ma carrière, j’ai aussi été interprète au Village Historique acadien de Bertrand, où j’ai développé un goût pour les légumes frais qui poussaient dans le jardin de la maison que j’animais. À ce moment-là, le médecin m’avait avertie que je devais changer mes habitudes alimentaires pour améliorer ma santé. N’ayant pas d’espace pour jardiner chez moi, je me suis mise à chercher des solutions créatives pour y arriver quand-même. J’ai découvert la culture de légumes en pots et j’ai fait pousser de belles récoltes dans ma cour, à partir de récipients recyclés et réutilisés. L’hiver venu, je me suis dit que s’il était possible de faire pousser des légumes dehors dans des pots et des plantes tropicales dans la maison, pourquoi pas faire pousser des légumes dans des pots à l’intérieur pendant l’hiver?

J’ai donc commencé à faire des expériences et j’ai été très surprise des résultats!

Dans mes démarches pour améliorer ma santé, j’ai fondé un chapitre TOPS (http://www.tops.org/) dans la Péninsule acadienne, dans le but de trouver d’autres gens qui voulaient perdre du poids pour leur santé, tout en partageant leurs expériences et leur appui.

Malgré un concept abordable et convivial, le matériel des TOPS est un programme unilingue anglais, dans une région francophone. J’ai donc eu l’idée de créer un tout nouveau projet qui serait francophone et qui suivrait les recommandations de Santé Canada. Mais par où commencer pour trouver un local, du matériel et autres ressources…

Quels sont le ou les changements que vous avez décidé de faire? Quel a été le « point tournant », soit le moment où vous avez décidé d’apporter un ou des changements?

Je me suis alors tournée vers le Réseau d’inclusion communautaire de la Péninsule acadienne (RIC-PA), puisque je connaissais la directrice générale, Julie Landry-Godin. Je lui ai demandé si elle connaissait des ressources qui pourraient m’aider. Julie m’a immédiatement mise en contact avec la conseillère en mieux-être de la Péninsule acadienne, Rachel Robichaud.

Tout en discutant du projet de groupe de soutien pour la perte de poids, la discussion a dérivé vers le jardinage. Julie m’a alors partagé que sa fille et ses camarades de l’école Ola-Léger de Bertrand voulaient faire un jardin à l’école. La solution s’est présentée d’elle-même: je suis allée rencontrer la directrice de l’école, Estelle Couture-Thériault, pour lui proposer de faire du troc: un prêt de local pour mon groupe de support en échange de la création d’un jardin intérieur/extérieur avec les élèves de l’école. Le marché fut conclu immédiatement, et l’école de Bas-Caraquet, où je conduis l’autobus, a trouvé l’idée si belle qu’ils ont voulu participer eux aussi à leur propre école!

Quels sont les défis auxquels vous avez eu à faire face et de quelle manière les avez-vous surmontés (qui ou quelle a été votre source d’appui)?

Le financement pour acheter du matériel était certainement un défi. Heureusement, l’agente de développement communautaire des deux écoles, Béatrice Chevat, s’est rapidement mise à la tâche pour remplir la demande de financement au programme « Actions communautaires en alimentation » du Réseau Mieux-être de la Péninsule acadienne et le projet a obtenu un financement. Le magasin Canadian Tire de Tracadie a également contribué en offrant de la terre, et ce pour une valeur de 300$.

Le plus grand défi dans un projet communautaire est d’engager les gens. Les enfants ont été faciles à gagner: dès le début ils ont démontré beaucoup d’intérêt et d’enthousiasme. Les professeurs ont aussi été d’une aide très précieuse: ils ont intégré les notions de jardinage dans le curriculum scolaire, donné du temps aux enfants pour participer à l’entretien du jardin et certains d’entre eux ont investi beaucoup de leur propre temps à ce projet de jardin poussant dans leur salle de classe.

Quels sont les résultats de votre démarche, pour vous et votre entourage, aujourd’hui et dans un proche avenir?

Les résultats du jardin ont dépassé les attentes et pas seulement en ce qui concerne la récolte des légumes! Beaucoup d’élèves qui ne mangeaient pas de légumes ont accepté de goûter, une fois qu’ils ont suivi et participé au développement de ceux-ci. Plusieurs en ont même redemandé! Ils ont appris qu’ils n’avaient pas besoin d’un grand espace ou d’installations coûteuses pour jardiner. L’émerveillement et l’excitation des enfants quand ils s’apercevaient que des légumes poussaient sur les plants était inestimable. Des enfants timides se sont épanouis en participant à ce projet qui touchait à leurs intérêts, au point d’en impressionner les enseignants.

Mon but ultime, c’est de montrer aux enfants que tout le monde peut se procurer des légumes sains, locaux, sans pesticides, à longueur d’année et pour peu d’investissement. J’espère ainsi leur inculquer de bonnes valeurs face à l’environnement et la santé. J’espère aussi leur montrer que les méthodes non conventionnelles sont intéressantes, créatives et souvent économiques.

De plus, le jardinage est une activité patrimoniale à préserver; je suis très contente d’avoir pu transmettre ce goût pour la nourriture fraîche et saine aux enfants et j’espère que le projet va se continuer pour des années encore!